· ivresse d'été ·
L’arrivée du soleil signe souvent l’heure du départ vers d’autres horizons ; cet été-là, j’avais pris quelques affaires afin de voir du pays. Lacs frémissants, mers chahuteuses & champs colorés m’ont rendu au centuple le regard amoureux dont je les aie contemplés ; les rencontres quant à elles ont laissé une jolie marque sur l’enveloppe de mon cœur. Quel bonheur de flâner sans impératifs ; j’aimais m’assoupir à l’ombre des arbres lorsque la chaleur enlaçait l’après-midi et étourdissait la ville, lentement. Et puis il y avait toujours ce parfum d’ivresse qui me collait à la peau, tout autant que l’insouciance de ma jeunesse.
Qu’il est agréable de déambuler dans les ruelles endormies des villes du sud, rythmées par le flegme des passants ; sur le pas d’une porte, un chat se prélasse et règne en maître sur les environs. Le temps semble figé, alourdi par la moiteur de l’atmosphère. Sous cette poussière de soleil tamisée, les passants sont à la recherche de la moindre oasis de fraîcheur. Tonnelles ombragées, halls de pierre ou feuillage fourni d’un arbre ; chaque recoin abrité des rayons dorés est prisé & envié de tous.
S’il y a bien un instant que j’affectionne particulièrement lors de ces journées longues et brûlantes, c’est lorsque le soleil se couche et éclate en mille et unes couleurs dans le ciel ; lorsque le rose, le orange et le rouge se mélangent jusqu’à former une aquarelle tendre et enveloppante. Ses rayons semblent fondre dans l’immensité bleutée de l’azur, revêtu d’une parure étincelante de lumière. Un soir, alors que j’étais assis sur le bord de la plage pour observer ce joli spectacle, je vis passer une jeune femme, où devrais-je dire un ange, tant sa beauté miroitait autour d’elle.
Sa jolie peau hâlée parsemée de sable et ses cheveux emmêlés à cause du sel lui donnaient un air sauvage & irrésistible. Ses lèvres pleines appelaient les baisers, et je devinais le galbe de ses formes élancées à travers la robe humide qu’elle avait revêtue après une baignade. Quelques pépites dorées se reflétaient dans ses yeux et allumèrent au creux de mon ventre une tempête violente, pleine de désir. Féline, elle se déplaçait d’une grâce inégalable en laissant derrière elle un parfum suave. L’envie de plonger au creux de son cou et d’enfouir ma tête dans sa longue chevelure de jais me tourmenta instantanément. (…)
Les étés passèrent, ainsi que ma jeunesse, et je ne revis jamais cette créature divine. Aujourd’hui encore, lorsque je rends visite à la mer, il me semble apercevoir son sourire au creux des vagues, caressant inlassablement la rive.
Ivresse d’été, jeunesse passée
Text by @lea_doom